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Lettre

Empreintes

Ne pas trop réfléchir aux 400 rétines, aux marques que l’on laisse au moment de l’attaque.

Botter en touche les visages fermés, refuser l’envoûtement des sourires.

Concentrée sur la précision de l’acte, la finesse du geste.

Placer l’ultime coup de pinceau. Il tinte sur le vase comme sur du crystal.

Dévouée à la forme.

La forme reste quand l’instant a cessé de sonner.

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SILENCE!

Ceci n´est pas un cri.

Ceci est une colère de koala.

Tout ce bruit dans tout ce monde égaré. qui crie plus fort que tout le monde.

Au paroxysme, des sombres manoeuvres, le protagonisme. Des vainqueurs et des vaincus dans des bouches pleines d’aphtes. Perpétuellement.

Et puis, enfin, le dégoût, un soulagement.

Sublimation. passer de l’état solide a l’état gazeux direct. sans se liquéfier. PV=nRT. Monter raide en pression sans exploser. chuis un glacon. bords incisifs, tout froid. veux pas fondre entre des doigts hagards.

Je m´évapore. Je songe au soupir, j´aspire à m’assoupir. pas plus.

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Medicine woman

N’est-ce pas étrange d’user des gens comme médecine? Et pourtant certaines rencontres soignent l’âme, et elle sait où chercher si on la laisse faire.

La solitude m’a guérie aussi, à sa manière. En me ramenant vers la présence qui, elle, n’était jamais partie. Qu’était là à attendre, dans son allure nonchalante d’éternité.

En guise de pansement, les bons soins d’un docteur m’ont soulagée. Rien ne sert de souffrir sans issue.

Les projecteurs, ça je gère. J’ai aimé, j’espère un retour de flamme.

On a tous en nous quelque chose d’un beau messie.

Parfois diamant.

Parfois charbon.

A.A.

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Embrassements

Un gros sanglot m’agite toute entiere a la lecture de tes mots. Je ne sais pas si il a commence par sortir des yeux ou rentrer par les pieds. Et puis il repart de moi dans l’air, dans la terre, dans la seve des pins ou dans l’ocean.

Tu sais c’est pas si affreux la solitude. Il ne faut pas s’en inquieter, d’abord observer ce sentiment, t’approcher un peu circonspecte, avec curiosite. Et commencer a vous apprivoiser, toi et ton renard. De multiples façons, tu as deja dompte des betes sauvages. Sache bien te souvenir que tout ce travail nous est vital, a nous-autres, meme si nous sommes loin, et qu’on fait le meme chacun de son cote. Les braves n’y echappent pas. Et parfois, quel bonheur de pouvoir nous retrouver, et se prendre dans les bras, dans les pattes, ou les nageoires, et meme danser ensemble! Ce bonheur, c’est le combustible. S’embrasser, alors que partout les forets s’embrasent. Il restera quoi?… le charbon.

Precurseur du diamant. Pour Theo et pour les autres.

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Illuminations obscures

Ma douce,

Au creux d’une sévère nuit sans sommeil, la réalisation finit par m’atteindre, celle de ma solitude… Alors que tant d’amis m’entouraient il y a un an encore, presque tous sont partis. Au moins ai-je la notion de leur présence dans un pays lointain pour me consoler.

Cela n’enlève rien à la douleur présente, une tristesse telle de me retrouver si seule, comme tu l’as bien senti. Il faut bien que j’avance dans ma ville dépeuplée, et que je continue jusqu’à retrouver la voie, ou la quiétude – un jour peut-être? J’ai l’impression d’errer depuis si longtemps que cette issue me semble absurde.

Pour toi en revanche la confiance grandit, pour preuve cette vision que j’ai eue dans la montagne, qui m’est apparue avec une telle clarté que je l’ai notée à la va-vite sur un bout de post-it.

Elle disait:

Tu vas le trouver ton chéri. Tu iras le chercher au fond de l’enfer s’il le faut, et vous rentrerez ensemble à la maison, et il te bâtira un grand lit où vous concevrez de beaux enfants, et vous les aimerez, et ils joueront devant le porche, pendant qu’on se racontera des histoires du temps jadis…

À bientôt, douce.

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pleine lune et jour de vierge

Je peux pas m’empecher de frissonner de joie profonde a l’idee que tu laisses ta cuirasse et tes desirs de scene. C’est mon cote gascon, qui meprise l’appat des feux de la rampe. Je peux pas m’empecher de penser aussi que c’est ta scorpionnerie, vous le charme, nous les larmes. Je peux pas m’empecher de m’emerveiller de te voir reprendre sans cesse chaque revers de ta cape surannee futuriste, la decoudre et faire un autre ourlet, d’un tout petit pli parceque tu le trouves joli.

Tu te rappelles de ma braise crevarde de la fois derniere? Figure toi, il y a eu un sacre appel d’air (avec un accent). Et moi qui avais quelques reserves de petit bois (tu sais comme je suis prevoyante), et meme un peu du moyen et meme du gros. Qui avait eu le temps de bien secher avec le climat de ces temps-ci. Je sais pas bien comment tout s’est produit, mais je me suis retrouvee dans cette ville mi-quasi moyen-orientale, mi-europeenne, mi-asiatique (eh oui! ca fait plus que 4 tiers!), a preparer a l’ancienne des specialites centro americaines, juste exactement de quoi me sentir chez moi ici. La poesie nous rattrappe toujours, et je ne peux pas m’empecher de continuer de croire (la langue francaise… quelle folie!) qu’une etoile veille sur nous. Comme Pouia, la chatte de Kleopatra, qui s’installe a cote de moi a chaque seance. (Pouia c’est le nom d’une etoile en Grec).

Ce n’est pas vraiment que je retrouve de l’espoir que j’avais perdu. Car il se trouve meme sous les cailloux et sous les feuilles mortes. dans chaque interstice comme un lichen, comme une mauvaise herbe, il croit (avec accent circonflexe aussi) et continue de croitre. C’est donc encore dans les ombres qu’est le terreau fertile.

Nous sommes au petit matin du 12 aralık. la lune est pleine et joyeuse en gemeaux. au mexique, c’est le jour de la virgen de guadalupe, la pacha mama reprisee en catholique. Bonne et pleine journee a toi ma tendre mousse chantante.

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Gantelet, gouttelettes

Lumineuse Ambre entre chienne et louve. Tu couves ton petit feu, c’est bien ce qu’il faut quand on manque de combustible et qu’on n’a que ce petit grésillement entre nous et la froide hostilité du dehors.

J’ai pour ma part tenté une autre approche pour me reconnecter au feu sacré, celui qui m’habitait quand j’ai fait le vœux d’être visible. De cette réalité que j’ai souhaité manifester avec tant de conviction il y a plusieurs années, j’en ai encore l’image nette. Je me vois souriante sur une scène, débordante d’énergie, communiant avec le public dans l’euphorie et les applaudissements, dans la grâce des instants au-delà des mots.

À l’époque où cette image m’apparaissait, je m’en souviens, j’ai vu la montagne à gravir. J’ai vu que le chemin qui y menait se perdait dans les nuages. Il faudrait payer à nouveau le prix de la visite aux esprits malins, il faudrait entrer dans la brume et accepter d’errer. La guerrière d’alors, emplie de la certitude des vainqueurs, y voyait la promesse d’une aventure.

J’y ai sauté à pieds joints dans ce nuage, du haut de mes baskets magiques. L’amour chevillé au corps, la cape flambante, le menton haut et l’œil fringuant.

Mais dans les brumes, point de glorieuse conquête. Avec pour seul horizon les perles du doute suspendues dans l’air, je ne vois que le rictus de mon propre ennemi, en reflet infini dans les vapeurs insaisissables. Je cours, je cours, sans savoir si je monte ou descend, si j’avance ou recule, en boucle sans rétroaction. La panique cède au désespoir.

C’est ainsi qu’une voix lointaine me trouve, sanglotant sur un rocher glissant, résignée à la réalité de mon égarement.

Alors je me lève. Fermant les yeux, je marche sans plus songer au sol ni au ciel, suspendue cette voix qui me dit : “Viens à moi !” À bout d’énergie, c’est un ressort du fond des âges qui me propulse et balaie toute discussion. Je jette mes vêtements trempés, ma cape profanée par les diablotins, mes bottes de sept lieux. Nue dans la brume ma peau se réchauffe et moi aussi je crée ma vapeur, et l’eau ruisselle sur moi comme une rivière.

J’ignore combien de temps encore je marche sans regarder. Je sais qu’à un moment j’ai vraiment chaud et que je dois m’arrêter. Enfin mes yeux s’ouvrent sur une prairie d’alpage, bercée de doux rayons dans une mer de nuages. Et apercevant le soleil, je me rends compte que j’étais en train de chanter.

A.

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ambre est lumière

De la lumière oui. une lumière blemme, une lumière fade une lumière voilée. à peine de quoi tenir mon coeur au calme. en secret je l’aime bien moi, mon petit feu sans joie. mais comme aucune étincelle ne jaillit, et qu’il ne brille pas du tout, il ne sait pas se défendre tout seul. Je le protège des tigres, comme le petit prince sa rose. J’ai qu’à soulever un peu la lèvre et laisser couler de cette bave épouvantable, pas facon Mononoke, plutôt genre un hérisson-garou. Après mes crises de lune froide, j’ère épuisée, affamée de tendresse pour me réparer. Je me demande: elle faisait comment la princesse au petit pois avant de marier le prince. Junkie de luxe, c’est pas pratique, non? Quand tu supportes pas la came coupée par exemple mais que t’es en chienne.

bref le bon vieux loop casse-pipe/casse-tête, grosse caisse/caisse claire. L’espace entre les nuits et les jours qui diminue, l’interstice entre espoir et désespoir qui devient tout fin, la fréquence de mes aller et venues qui augmente. je flippe. balle de flipper qui dépasse la vitesse du son. après la ritournelle, je dépasse lentement l’entendement de ce ping-pong strident pour passer a l’observation du dessin que forment les alteration du rythme. En gardant comme un reef de basse l’usage clair et précis de la mémoire disons plus linéaire. eh oui, c’est elle… la ligne de basse. en vrai, j’ai pas encore tout a fait le bon geste mais je vais y arriver. En tous cas, vivement la révolution quantique parceque en attendant c’est laborieux! et mortellement ennuyeux!

non, moi ce qui me déglingue, c’est de penser à mes enfants, ceux qui sont pas là, tous les jours. c’est ce clan imaginaire qui brille par son absence, et c’est cet amour que j’ai rencontré en vrai et que par amour, j’ai quitté. moi qui croyais si mystérieuse la possibilité d’une identité unique il y a quelques semaines, me voilà qui trouve la réponse toute bête maintenant. la persistance du j’, c’est l’amour! et la persistance de l’amour me diras-tu? sûrement son polymorphisme, comme un phasme avec plusieurs vies de chat. comme la persistance rétinienne, ca impressionne, mais tellement… c’est comme un supplice, ou comme d’apprendre à parler une nouvelle langue, je veux dire à vivre dans un endroit, on se retrouve une fois de plus en bas de la colline,avec un gros caillou a pousser, et avec la connaissance affinée de l’effort que cela demande, la fatigue des dernères montées encore dans tout le corps.

Dis donc au fait, tu savais toi qu’écrire ça faisait sécréter de l’acetylcholine? à part ca, j’ai trouvé un nom: Ambre Grise.

Ceci n’est pas un Post Scriptum: j’aurais dû te prévenir que ca risquait d’etre indigeste cette fois.

Bien bien à toi (avec et sans virgule)

A.G.

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Émois des mois

Très chère,

Étant sans nouvelles depuis quelques temps, je te suppose engouffrée dans une tortueuse quête intérieure. La mienne n’a pas atteint le point où tout s’éclaircit, mais j’en suis à pousser le wagon hors des mines de mes ruminations. Il sortira par la force s’il le faut.

Comment savoir que le fruit est mûr? N’en sommes-nous pas toujours à observer avec effet retard ce qui s’est déjà achevé? Y a-t-il une force mystérieuse qui me souffle d’accoucher, ou est-ce la lassitude de porter cette genèse qui me fait pousser avant l’heure?

Si pour moi les origines sont relativement balisées, elles n’en sont pas forcément apaisées. Les secrets et les non-achevés continuent toujours de nous rendre visite, même quand on les avait consciemment oubliés. Les racines peuvent nous alourdir telle une bûche, si trop peu de soin a été mis à les garder en vie.

C’est du côté de mes identités choisies que la confusion règne. En témoigne la page de ma vitrine professionnelle en éternel chantier, bloquée en synchronique avec le muscle raide de ma nuque droite.

Comme je rêve d’un bureau avec une porte et mon nom dessus ! Et sous mon nom, en lettres d’imprimerie, un beau titre bien concis, franc du collier.

De cette hésitation je ne sais qu’en déduire. Je me plais à penser que si je ne veux pas qu’on me trouve, c’est que j’ai peur de me trouver.

Tes lumières me seraient bienvenues, si toutefois il s’en trouve dans l’endroit où tu marches.

Bien affectueusement,

A.

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Belle amie,

Comme un rappel de l’impermanence, notre correspondance a fait des embardées avec le réel…

Nous revoici, cette fois je l’assure, sur des bases plus solides!

A.